jeudi 20 décembre 2012

En me rasant le matin...


Quand nous étions jeunes et beaux , Grand Amour et moi, en nullipares naïfs, rêvions à notre grande et belle famille.

"Et si on a un garçon on l'appelera, Maxime."
" Et si c'est une fille, Clara."
"4 enfants, c'est bien! Une belle famille nombreuse mais pas trop,
" On évite le 2 contre 1 c'est tellement mieux le 2 contre 2, 4, c'est le nombre idéal."
"Ouais mais attends... si on tombe sur un p'tit fruit boulet qui dort pas, on voudra peut-être pas en refaire un autre? Parce que le manque de sommeil, je pourrais pas hein" (éclair de lucidité)
"T'as raison.... Disons qu'on en aura minimum 2, et après on verra si on se sent d'attaque."
"Deal ! On commence par 2 et les autres viendront s'ils doivent venir"

Et tout comme les 2 prénoms sus-cités ont été balayés d'un rien pendant notre première grossesse, alors qu'ils nous accompagnaient dans nos rêveries depuis plusieurs années.... la belle et grande famille a été assez vite rangée dans la catégorie "c'est bon de rêver".

Parce qu'à l'arrivée de la Framboise, la maternité ne s'est pas imposée à moi facilement.

Ma soeur m'avait dit que c'était formidable, qu'elle se sentait merveilleusement bien enceinte, qu'elle pourrait être enceinte toute sa vie, qu'une fois le bébé né, c'est QUE du bonheur, que sa vie d'avant ne lui manquait jamais parce que franchement mais qu'est-ce qu'on s'ennuyait avant?, qu'elle n'avait l'impression d'être sur Terre que pour devenir mère.

Mouais, j'ai pas tiré le même lot au grand jeu de la distribution des gênes familiaux.

Je n'ai pas ressenti d'épanouissement particulier à être enceinte. Je ne me reconnaissais plus par moments ("mais pourquoi tu pleures devant la météo ma pauvre fille?? Oui, l'hiver est long et interminable, mais cela mérite-t-il de te mettre dans des états pareils?").
La Framboise est née et... je me suis sentie très démunie et terrassée par ma toute nouvelle responsabilité de mère. Je me rappelle de notre retour à la maison après la maternité. Je me rappelle de déposer la nacelle dans le salon, la Framboise endormie paisiblement. 
"Et on fait quoi maintenant?"  
Je l'aime mais p*tain, j'ai peur.

Puis viennent les nuits hachées, les douleurs de ce premier allaitement, les repas froids pris en décalé, les questions ("elle a faim?" / "elle a froid?" / "elle est fatiguée?" / "elle est malade?"), la reprise du boulot, les trop nombreuses visites chez le pédiatre (bronchiolite, bronchites, varicelle, rhino-pharyngites, gastro-entérite, roséole et j'en passe), les trop nombreuses visites chez le kiné-respi, la Fatigue avec un grand F, le temps qui file sans qu'on ait le temps de rien faire, les grasses mat à jamais disparues,  les gestes automatiques en mode zombie, la sollicitation permanente, la sensation fugace d'une liberté perdue....
Puis viennent les premières bouffées d'amours euphorisantes, l'odeur "barbe à papa" de ses cheveux, les premiers sourires qui te transforment en chamallow à l'intérieur, les bagarres avec Grand-Amour pour être le premier dans sa chambre le matin, l'émerveillement devant tout ce qu'elle fait, les éclats de rire devant ses pitreries, la fierté de raconter le moindre de ses progrès, mon coeur qui se liquéfie lorsqu'elle prononce son premier "Maman" ou qu'elle me glisse un "je t'aime" à l'oreille...

Je l'aime mais j'ai peur. Et c'est dur parfois.
Devenir parent, c'est bien plus compliqué que ce que j'imaginais.
Et c'est bien plus fort que ce que j'imaginais aussi.
Et oui, parfois, je me sens écrasée par le poids de ma parentalité, (alors que ça semble plus naturel à Grand Amour).

Malgré tout, l'envie d'agrandir la famille est très vite là... mais on se le confie déjà : "on ira sans doute pas jusqu'à 4, hein?"
Après tout, je ne suis pas la mère que j'imaginais, pourquoi la famille que j'imaginais ne changerait-elle pas? Tout simplement.

Bon, ce deuxième bébé, nous sommes sûrs, archi-sûrs, on en a envie et on le veut assez rapproché. Alors lançons nous. 
Entre le moment où on a voulu la Groseille et le jour où elle a déboulé dans nos vies, j'ai connu 2 fois cette épreuve qu'on appelle fausse-couche.
Le mot est laid. L'expérience humaine qu'il définit aussi. La vie vous offre un cadeau, un merveilleux cadeau... vous le chérissez, vous imaginez notre vie avec, vous le voyez prendre sa place dans votre univers et tout un coup, la vie vous le reprend et vous laisse le ventre vide et les yeux pleins de larmes. Avec de trop nombreuses questions, encore.
Le temps et un nouveau cadeau de la vie adoucit la peine, oui, il faut le reconnaître.... mais les souvenirs de ce "bébé de janvier" et de ce "bébé de mai", ils restent quand même.

Le tourbillon de la naissance d'un nouveau né.
On pense le connaître quand on y est passé une première fois. Mais non, un bébé ne ressemble pas à un autre. Le nouvel équilibre à 4 a été sportif à trouver, c'est rien de le dire.
2 enfants d'âge rapproché avec un Papa beaucoup moins présent au quotidien qu'avant (changement imprévu de rythme de travail 1 mois après l'arrivée de la Groseille), ça oblige à s'astreindre à une organisation sans faille.
Ce qui ne me pose habituellement pas trop de problème, quand j'ai mon quota minimum de sommeil.

Une Groseille ne sachant pas ce que c'est de dormir la nuit avant l'âge de 9 mois (et de nombreux ratés depuis, et encore à ce jour)
+
Une Framboise qui décrète que les siestes en journée c'est le mal
+
Une reprise de boulot, même à 80%
+
Tout le quotidien d'une maison à gérer seule
= une Maman au bord du burn-out.

J'ai claironné à toutes mes amies qu'on ne m'y reprendrait plus, que jamais, oh non jamais, on n'aurait un autre enfant. Le deal, c'était "On commence par 2 et les autres viendront s'ils doivent venir". Ben c'est sûr, ils viendront pas. Parce que 2, finalement, c'est bien. On reste à 4, comme les Beatles, et all you need is love...

Puis on dort quand même de mieux en mieux, puis la Groseille a un an.
Puis j'ai laissé tomber le ménage.
Puis je ne trouve plus d'épanouissement dans mon travail, mais tant pis c'est plus ma priorité.
Puis la Groseille et la Framboise, elles commencent à être vraiment complices.
Elles papotent, elles inventent leurs petits jeux, elles rigolent et elles se chamaillent aussi. Ma salade de fruits grandit, et c'est de plus en plus chouette.
Le tourbillon du quotiden s'apaise un peu, on retrouve des repères, la vie de famille redevient très agréable.

Et j'y repense.
Le deal, c'était "On commence par 2 et les autres viendront s'ils doivent venir"
...
Est-ce que les autres doivent venir ?
...
Malheureuse, tu n'y penses pas!
Je dois me rendre à l'évidence: si, j'y pense.

Mais, mais, mais ...
Est-ce que je me sens capable de mener une nouvelle grossesse avec les 2 tornades à gérer?
Est-ce que je me sens capable de revivre ces mois sans sommeil auprès d'un nouveau né?
Est-ce que je me sens capable d'accorder suffisamment de temps aux 2 premiers p'tits fruits tout en jonglant avec un bourgeon?
Et....
Est-ce que finalement, les 2 autres, ils sont pas déjà un peu venus, avec ces 2 RDVs manqués en janvier et en mai?
Est-ce que la solution ne serait pas le juste milieu? Un(e) p'tit(e) troisième et dernier(e)?
Est-ce que la vérité est à 5, comme les 5 doigts de la main, les 5 continents??

Bon, pour l'instant, Grand Amour est plutôt enclin à penser que la vérité est ailleurs.

Mais, si, j'y pense.

1 commentaire:

  1. le même dilemme ici...
    j'en voulais 4!
    j'ai galéré pour avoir mon fils...
    ma fille est venue sans prévenir... une leçon de vie...
    je n'en veux plus 4...
    un troisième? oui j'y pense beaucoup mais pas maintenant, peur de casser notre bulle à 4 ...

    RépondreSupprimer